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Editions Grasset 2016
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"Ce livre raconte une amitié. Il présente l’œuvre de Girard dans la lumière rétrospective que constitue sa fin. C’est au « jour de colère » que se fait entendre la parole. La sienne et celle des textes qu’il sut génialement interpréter : les Evangiles, Shakespeare, Stendhal ou Proust garderont longtemps pour moi l’accent du Midi." Ecouter Benoît Chantre
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LIRE UN EXTRAIT
René Girard avait écrit en 1972 : « La violence essentielle revient sur nous de façon spectaculaire, non seulement sur le plan de l’histoire, mais sur le plan du savoir. » Il s’est éteint dans la semaine qui a précédé les attentats du 13 novembre 2015. Il n’avait rien d’un prophète de malheur. Sa pensée donne forme et sens à notre avenir. Nous devons réentendre sa voix.
Il m’a fallu répondre au choc de deux événements conjoints : la mort d’un maître et d’un ami, et les horreurs parisiennes. Ces réalités constituent une énigme où se confrontent l’invisible et le monstrueux, la violence et le secret, l’élégance et l’obscénité. Elles m’ont forcé à évoquer les « derniers jours » : ceux de René Girard et la fin des temps qu’il pensa dans son œuvre.
Mais beaucoup se sont mépris sur son pessimisme. L’annonce d’un démembrement du monde révélait moins la mélancolie d’un romantique que la joie du Royaume entrevu un soir d’été en Avignon ou dans le silence parfumé de Stanford. J’ai voulu rendre présent ce penseur apocalyptique qui fut drôle et discret, dont l’espérance était profonde.
Ce livre raconte une amitié. Il présente l’œuvre de Girard dans la lumière rétrospective que constitue sa fin. C’est au « jour de colère » que se fait entendre la parole. La sienne et celle des textes qu’il sut génialement interpréter : les Evangiles, Shakespeare, Stendhal ou Proust garderont longtemps pour moi l’accent du Midi.
240 pages - EDITIONS GRASSET
Benoît Chantre est docteur ès lettres, fellow de la fondation Imitatio (San Francisco), membre associé du Centre international d’étude de la philosophie française contemporaine (CIEPFC, Rue d’Ulm), et prési- dent de l’Association Recherches Mimétiques. Il a collaboré à diverses revues (Artpress, Esprit, L’Infini, La Revue des deux mondes...), écrit sur des artistes contemporains et organisé des colloques univer- sitaires ou des rencontres d’écrivains, à Paris et à la Villa Médicis. Ses recherches portent sur les œuvres de Bergson, Girard, Levinas, Péguy et Simone Weil. Il a publié en 2007 avec René Girard Achever Clausewitz (réédition « Champs », Flammarion, 2012), en 2014 un essai sur Péguy aux Editions du Fé- lin (Péguy point final) et en 2016 Les Derniers jours de René Girard aux Editions Grasset.
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Editions Grasset 1961 ISBN 2012789773
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L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles.
Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ?
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L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles.
Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ?
ECOUTER - VOIR
Apostrophe
René Girard est reçu par Bernard Pivot
France Culture - A voix nue (30/08/2004):
René Girard s’entretient avec Raphaël Enthoven à propos de "Mensonge romantique et vérité romanesque"
Radio France "Les nouveaux chemins de la connaissance"
Benoît Chantre s'entretient avec Adème von Reeth sur " "La violence et le sacré"
[play] 1ère partie
Retour à Baby-Loup. Contribution à une désescalade
Cahiers de l'ARM Editions Petra
Compte-rendu de Christine Orsini, Secrétaire générale de l'ARM :
Voici un livre tout à fait remarquable : exemplaire sur le plan de la méthode, associant à l’enquête sur le terrain le travail de la recherche en amont et celui de la réflexion en aval, il devrait servir de modèle à tous les journalistes d’investigation. Au-delà de sa qualité professionnelle, le livre de François Hien est de ceux qui impriment leur marque sur le lecteur, un livre qui change votre regard, non seulement sur l’objet qu’il examine, qui fut un objet de débats passionnés, mais surtout sur vous-même, que vous ayez ou non participé à ces débats. Je tiens absolument à le dire, c’est un livre qui vous rend meilleur.
François Hien s’est emparé d’une histoire de voile islamique, qui a duré de 2008 à 2013 et reste, du fait de son sujet, d’une « brûlante actualité » : l’affaire de la crèche Baby Loup. Comme l’indique le titre du livre, le but de l’auteur n’est pas seulement de comprendre comment un fait divers local est devenu une « affaire » nationale mais de remédier autant qu’il est en son pouvoir, à un mal qui ronge de l’intérieur autant les individus que les sociétés ; quel que soit le nom qu’on lui donne, islamophobie, antiracisme ou ressentiment de populations marginalisées, ce mal se signale par la haine de l’Autre, dont la face cachée pourrait bien être la haine de soi. La démarche éthique, ici, est inséparable de la démarche de connaissance : c’est une des leçons à tirer de ce livre qui n’en donne aucune, le diable est moins dans les « détails » que dans les généralités. Il ne faut jamais lâcher le réel. L’imprécision est le terreau idéal du mensonge qui ne se reconnaît pas comme tel, le mensonge à soi-même.
C’est donc avec une extrême précision que l’auteur nous relate les faits et leurs interprétations, qui participent à la dynamique du conflit et qu’il traite comme des faits. Il y a celles des théoriciens, celles des journalistes, celles des acteurs du drame. L’hyper médiatisation de l’affaire a eu une influence sur son déroulement, ainsi que les décisions de justice. Plus encore que les faits, les mots par lesquels on les désigne nourrissent le conflit, ils donnent une (fausse) identité à chaque camp : d’un côté, le camp de la laïcité, de l’autre, celui de l’antiracisme. L’auteur montre qu’en réalité, l’affrontement mettait en jeu deux interprétations de la laïcité, deux conceptions opposées du féminisme et fut celui de deux corps sociaux blessés dont chacun attribuait à l’autre l’entière responsabilité de ses désordres internes. L’auteur dévoile la complexité de l’affaire, complexité dont les hésitations de la justice témoignent et qui contraste avec le simplisme dogmatique et le manichéisme des deux camps. La fin de l’affaire judiciaire en 2013 et le déménagement de cette crèche hors-normes, qui fut longtemps la fierté de sa commune, n’ont pas mis un terme à l’escalade du ressentiment, au contraire.
François Hien a lu René Girard. Cela lui permet de voir d’emblée, en l’identifiant à une situation romanesque, que la relation entre Fatima, la rebelle voilée, et Natalia, la directrice féministe de la crèche ne peut être ramenée à un conflit idéologique ni même à une lutte pour le pouvoir. Sans y être inféodé, l’auteur fait appel aux outils girardiens, concepts et analyses, pour rendre manifeste ce que les haines et les ressentiments dissimulent : la symétrie (toute relative, puisque les deux camps ne sont pas de force égale) des accusations et des positions ; chaque camp se dit « en défense », se présente comme la victime de l’autre, ce qui légitime la violence de ses attaques. On voit le risque d’une « montée aux extrêmes », en cas de défaillance des institutions chargées de contenir la violence. Le « mécanisme du bouc émissaire » ne peut plus fonctionner pour apaiser les tensions : chaque camp se dit le « bouc émissaire » de l’autre. Nous avons cependant la liberté de nous extraire du « jeu ». Par ce petit livre, à l’écriture soignée, que vous lirez comme un roman, François Hien contribue effectivement à une « désescalade » et tout lecteur de bonne volonté ne peut que lui en être infiniment reconnaissant.
La crèche "Baby-Loup", dans les Yvelines, est une association hors norme : dirigée par l'exilée chilienne Natalia Baleato, elle est la seule crèche de France ouverte 24 heures sur 24. Située dans un quartier réputé difficile, elle embauche des femmes sans qualification à qui elle permet d'obtenir un diplôme.
Jusqu'en 2008, cette crèche était un outil social apprécié par tout un quartier. Mais en 2008, Fatima Afif, directrice adjointe de la crèche, revient d'un long congé parental entourée d'un grand voile islamique, qu'elle refuse de retirer alors que le règlement intérieur lui impose la neutralité religieuse. Elle est licenciée et porte plainte pour discrimination.
Cinq jugements ont été rendus jusqu'en 2013. Militants, philosophes, intellectuels, journalistes, responsables religieux se sont emparés de la question. À partir d'une enquête de terrain et des outils empruntés à la théorie mimétique de René Girard, François Hien s'efforce de comprendre la nature de ce conflit, en défaisant les représentations archétypales que chaque camp s'est construit de l'autre.
Introduction
L'Affaire Baby-Loup
Le choix de Fatima Afif
Laïcité contre laïcité
La critique immanente
Féminisme contre féminisme
Les prophéties auto-réalisatrices
Stéréotypes d'accusation
Boucs émissaires partout, justice nulle part
Être de bonne volonté
François Hien est réalisateur de documentaires, auteur pour une compagnie de théâtre et intervenant dans le champ de l'éducation populaire. Ayant repris voici cinq ans des études de philosophie par correspondance, il a consacré ses deux mémoires de Master à René Girard. Il a écrit une pièce de théâtre adaptée de l'affaire Baby Loup et prépare un long métrage de fiction, qui sera tourné à Saint-Etienne.
Plus d'informations sur : www.francoishien.fr
>>> Acheter sur le site de l'éditeur (15 euros - port gratuit)
François Hien parle de son livre et de son travail théâtral
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Editions Deslée de Brower 2015
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"Ces « leçons » sont une très agréable surprise, sur la forme et le fond. Très lisibles, très alertes, bourrées de comparaisons et d’images parlantes, non dépourvues d’humour anglo-saxon, elles ont sur le lecteur un effet entraînant qui manque, hélas, à beaucoup de livres de théologie même « bons », mais souvent gris et bas comme un ciel de novembre. En même temps, sur le fond c’est bien un livre de théologie, à l’occasion « conceptuel », que propose J. Alison – et aussi un livre « spirituel », où le lien entre ce qu’on pourrait appeler le « mystère de la foi » et ses conséquences concrètes pour le croyant (son corps, ses sentiments, ses attitudes, son espérance, sa joie et peut-être même ses tristesses, son son action et sa prière…) ne se perd jamais.
Cette dimension « existentielle » omniprésente est due aussi au |
commentaire, très vivant et coloré, original aussi, de textes bibliques et évangéliques aussi dérangeants que consolants, quiillustrent chaque étape du parcours (à commencer par le premier, vraiment magnifique, des « pèlerins d’Emmaüs »).
Alison est un « girardien », marqué donc par la « théorie mimétique » de René Girard, qu’il l’utilise avec discrétion et sans lourdeur alors même qu’elle est omniprésente et que son livre en montre toute la justesse et la fécondité. Particulièrement frappantes et « libérantes », à cet égard, les nombreuses pages où il désigne et décrit l’une des grandes maladies du christianisme : le ressentiment, le désir de vengeance et leurs multiples miasmes, ainsi que les voies pour sortir de ce cercle maléfique. Emblématique de ce programme, le titre du dernier chapitre : « Qu’est-ce qu’habiter un commandement non moralisant ? » Jean-Louis Schlegel
James Alison est prêtre catholique anglais, théologien et écrivain. Il est fellow de la Fondation Imitatio et responsable du Département éducation de cette fondation. Il est reconnu pour ses travaux sur les applications de la théorie mimétique à la théologie. Il a étudié chez les Dominicains à Oxford. Il est l'auteur de nombreux ouvrages en anglais, dont plusieurs ont déjà été traduits en différentes langues. Il réside actuellement à São Paulo, Brésil.
Vidéo (7mn) : " Interview de James Alison sur sa relation à l'oeuvre de René Girard"
https://www.youtube.com/watch?v=qIRpXWNURYg
Vidéo (19mn) : Intervention de René Girard à la conférence/ débat clôturant la « Chaire René Girard 2009 » au Collège des Bernardins :"Fécondité de la pensée de René Girard pour le christianisme"
La Croix par le père David Roure
"Ce dominicain anglais réussit son pari de présenter le christianisme de manière inattendue et vivifiante"
"Un des attraits, et non des moindres, du livre de James Alison, est l’humour typiquement britannique avec lequel il s’exprime. Ainsi, il illustre des notions et des réflexions qui, dans leur abstraction, seraient ardues et rébarbatives, par des exemples tirés de l’actualité politique ou culturelle. .../... lire la suite
L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles.
Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ?
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Editions de Minuit, 2016
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« La connaissance de soi est à la fois inutile et inappétissante. Qui souvent s’examine n’avance guère dans la connaissance de lui-même. Et moins on se connaît, mieux on se porte.
Il ne s’agit pas dans ce livre du problème de l’identité, sujet rebattu depuis l’Antiquité (et que j’ai moi-même souvent eu l’occasion d’aborder), mais du problème du sentiment de l’identité, sujet il est vrai également très rebattu, notamment depuis les analyses célèbres de David Hume. L’enquête à ce sujet mène à d’étranges considérations et paradoxes. Elle conduit aussi à s’interroger – et c’est là, comme toujours, le point qui me paraît le plus intéressant de tous –, au-delà de l’aveuglement où est l’individu quant à lui-même, sur la nature de l’irrésistible et déraisonnable aveuglement qui le porte à vivre. » Clément Rosset |
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Editions du Seuil, 2016
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Les robots sociaux sont conçus pour fonctionner au sein de milieux façonnés, contrôlés et occupés par des êtres humains. Leur apparence physique n’est pas faite pour tromper : ils restent aux yeux de tous des robots qui ne « singent » pas l’homme. Il est pourtant possible de leur conférer une individualité. Les recherches les plus avancées visent à les rendre capables d’émotions et à les doter d’empathie. La robotique sociale tend à créer des substituts, des robots susceptibles de nous remplacer dans certaines tâches, mais sans pour autant qu’ils prennent notre place. La majorité des objets techniques omniprésents dans notre vie demeurent invisibles tant qu’ils fonctionnent correctement. La présence active, qui est la condition essentielle de leur rôle de substitut, est au contraire la |
caractéristique centrale des robots sociaux.
Ce livre dessine les traits d’une transformation technique, sociale et culturelle déjà en cours de réalisation, une relation de coévolution qui n’a jamais eu de précédent dans l’histoire de l’humanité. Cette relation avec des créatures artificielles dotées de compétences sociales et capables de remplir des rôles sociaux va conduire l’humanité à une bifurcation où des formes neuves de socialité seront susceptibles de surgir.
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Editions du Seuil, 2016
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Trop souvent, on traite la jalousie et l’envie comme si elles étaient interchangeables. Rien n’est plus faux. Ce livre part de la théorie du désir mimétique de René Girard : le sujet envie le modèle qui a éveillé en lui le désir pour un objet que pourtant ce modèle se réserve. Il n’y a pas de désir sans rivalité ni de rivalité sans désir. Or cette théorie échoue à rendre compte de la jalousie. Élucider cet obstacle conduit à mettre en question le caractère universel du désir mimétique.
Celui-ci prend au départ la forme d’un triangle : le sujet, le modèle et et l’objet. Or la jalousie relève d’une tout autre géométrie : on souffre d’être exclu d’un monde qu’on voit se clore sur soi-même. Dans la jalousie amoureuse, ce monde est formé par l’étreinte des
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deux amants. Don Giovanni n’imite ni n’envie le paysan Masetto, qu’il méprise ; mais il ne peut supporter le cercle amoureux qu’il forme avec Zerlina. Son désir commence par la jalousie. Celle-ci est, comme chez Proust, antérieure au désir.
Nourri de littérature, de philosophie et d’expériences personnelles, ce livre débouche sur une théorie générale de la jalousie, cette souffrance tenue pour une composante indépassable de la condition humaine. Une postface d’Olivier Rey met cette théorie à l’épreuve de la psychanalyse.
Philosophe, Jean-Pierre Dupuy est professeur émérite à l’École Polytechnique et professeur titulaire à l’université Stanford (Californie). Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages dont Petite Métaphysique des tsunamis (Seuil, 2005, Points, 2014) et L’Avenir de l’économie. Sortir de l’économystification (Flammarion, 2012).
Postface d'Olivier Rey.
Chargé de recherche au CNRS, membre de l’Institut d’histoire et de philosophie des sciences et des techniques à Paris, Olivier Rey a enseigné les mathématiques à l’École polytechnique, et enseigne aujourd’hui la philosophie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il a publié récemment un essai, Une question de taille, et un roman,Après la chute.
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Editions Editions Vrin (2015)
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Annexe II : « Violence et pardon : Girard, Levinas et au-delà ».
Jean-Luc Marion, de l’Académie française, est professeur émérite de l’Université Paris- Sorbonne et Andrew Thomas Greeley Professor à The University of Chicago > écouter Jean-Luc Marion au colloque René Girard- Emmanuel Levinas, (ARM / Ecole normale supérieure, 201 |
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Editions L’Iconoclaste(2015)
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Ouvrage écrit dans le sillage d’Achever Clausewitz et dédié à René Girard.
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Editions Albin Michel (2015)
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La pensée de René Girard est ici convoquée à plusieurs reprises.
> Critique de PAtrice Trapier (Journal du dimanche 30/08/2015) Par temps de crise (nous y sommes depuis plus de trois décennies), la science économique est une matière valorisée (ses experts sont écoutés comme des Pythies) et instable (leurs oracles sont sans cesse démentis par les imprévisibles tête-à-queue des mutations en cours). Daniel Cohen évite ce jeu infernal (prédire demain au futur de l'impératif) pour s'en tenir à son travail d'intellectuel (tenter de comprendre, au conditionnel, ce qui relie hier à demain, plus sûrement à après-demain). Agrégé de maths et d'économie, Cohen sait s'extirper de l'asséchant tête-à-tête avec les interminables colonnes chiffrées des bilans et |
pour enrichir ses analyses grâce à son goût prononcé pour l'histoire, l'anthropologie, la philosophie et la psychanalyse. Le titre de son dernier ouvrage (Le monde est clos et le désir infini) est inspiré par le philosophe des sciences, Alexandre Koyré (Du monde clos à l'univers infini). Son sujet (la société sans croissance) traduit une inflexion. Il a longtemps pensé que la croissance était notre bien le plus précieux ; qu'en son absence, tous les périls guettaient, avant d'admettre que son affaiblissement régulier était moins la variable passagère d'une adaptation à la mondialisation que la résultante structurelle de l'avènement de la société numérique.
Un troisième big bang, la société numérique
Après tout, la croissance est une idée nouvelle. Cohen nous rappelle deux enseignements du temps long : 1/Considérer que ces trente dernières années tellement chahutées sont une tête d'épingle à l'échelle de l'humanité. 2/Prendre en compte l'accélération considérable des processus humains : il y a dix millions d'années, apparaissaient les hominidés ; il y a un million d'années, l'Homo erectus ; il y a cent mille ans, l'Homo sapiens ; il y a dix mille ans, l'agriculture ; il y a mille ans, l'imprimerie ; il y a cent ans, l'électricité ; il y a dix ans, Internet. Jusqu'où nous mènera ce mouvement vertigineux?
Après le premier big bang, l'agriculture, qui a entraîné la première explosion démographique et une cascade d'inventions, de l'écriture à la poudre ; après le deuxième big bang, la révolution scientifique du XVIIe siècle, qui a ouvert la voie à la révolution industrielle, à la croissance économique et à son pendant spirituel, l'idée du progrès, nous abordons un troisième big bang, la société numérique post-industrielle qui clôt la parenthèse industrielle. Et, c'est toute la question, son culte de la croissance et du progrès, qui avait succédé aux religions toutes puissantes. Il n'est d'ailleurs pas anodin que l'actuelle décroissance s'accompagne d'une remontée des sentiments religieux extrêmes.
Faut-il se préparer à vivre durablement sans croissance? Cohen présente les deux scénarios. 1/Pessimiste : la révolution numérique détruira près de la moitié des emplois (et toutes les tâches répétitives) et ne servira qu'à mieux organiser la vie des plus aisés sans rien bouleverser fondamentalement de notre univers (aucune invention comparable à l'automobile ou à l'électricité). 2/Optimiste : après une période de destruction-adaptation, l'alliance d'Internet et de la biologie (voire de l'énergie) ouvrira des perspectives inouïes, notamment du côté de l'allongement de la vie, qui bouleverseront les conditions de l'activité économique, et donc de la croissance.
De nouvelles formes de progrès sans croissance
Sans trancher, même s'il laisse deviner sa crainte que le scénario pessimiste soit le plus probable, Daniel Cohen constate que le monde post-industriel explose tous les cadres stables, que la montée des inégalités n'est pas seulement salariale mais surtout patrimoniale, qu'après un capitalisme unificateur vient le temps d'une fragmentation des richesses, des territoires et des individus.
En héritier des Lumières, prônant l'équilibre entre partage collectif et initiative individuelle, Daniel Cohen essaie de penser de nouvelles formes de progrès sans croissance, à l'heure où le défi climatique peut permettre de réunifier des sociétés luttant contre la tentation de l'affrontement. Il le fait en tenant compte des enseignements de René Girard (sur le danger du bouc émissaire) et de Sigmund Freud (sur le désir humain jamais assouvi). Ce livre, en même temps érudit et d'une lecture très abordable, est un guide essentiel pour temps troublés.
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Editions Petra (2015)
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Ce livre a pour ambition de mettre en lumière des affinités électives entre la théorie mimétique, développée par René Girard, et un ensemble de procédés esthétiques et intellectuels qui composent un nouveau cadre théorique, la poétique de l'émulation, et qui caractérisent la force des cultures shakespeariennes, autrement dit des cultures ne pouvant se définir qu'à travers le regard de l'Autre.
De fait, le défi de la mimesis définit le noyau à partir duquel se constituent les cultures latino-américaines ou, plus généralement, les cultures formées dans des contextes non-hégémoniques. Voilà un principe de base qui définit les stratégies des cultures latino-américaines, car toutes ses sont développées en inventant des manières de s'approprier l'Autre, lequel, dans un premier temps du moins, leur a été imposé violemment. |
Pour développer ces hypothèses, la première partie sera consacrée à des questions théoriques liées au défi de la mimesis: Nous explorerons ce défi par une étude de cas : la centralité de l'exil dans l'imaginaire brésilien. Enfin, la troisième partie sera centré sur des aspects prégnants de la littérature brésilienne contemporaine.
Joao De Castro Rocha
Essayiste et professeur de littérature comparée à l'Université de l'état de Rio de Janeiro (UERJ). Il a notamment écrit "Machado de Assis: por uma poética da emulaçao" (Civilizaçao Brasileira, 2013), récompensé par le Prix de la critique et de l'histoire littéraire de l'Académie Brésilienne des Lettres, et traduit en anglais sous le titre "Machado de Assis: Toward a Poetics of Emulation" (Michigan State University Press, 2015); ou encore "Culturas shakespearianas? Teoria Mimética y América Latina" (Universidad Iberoamericana/ITESO, 2014), ainsi que "Les Origines de la culture" (Prix Aujourd'hui, 2004), co-écrit avec René Girard et Pierpaollo Antonello. Il a organisé près d'une vingtaine de titres et collabore régulièrement avec la presse.
SOMMAIRE
Avant-propos
Introduction : Le défi de la mimésis : cultures shakespeariennes,
poétique de l’émulation et théorie mimétique
Première partie :
Un regard singulier : des questions théoriques
I. Cultures shakespeariennes
II. Pour une poétique de l’émulation : littérature des faubourgs du monde ?
III. Roberto Fernández Retamar : poète et penseur de « Nuestra América »
IV. L’émulation en tant que forme : une lecture de Machado de Assis
V. Théorie mimétique et cannibalisme – René Girard et Amérique Latine
VI. Littérature : aujourd’hui ? Ou le déplacement de la Bildung
Excursus
Deuxième partie :
Exil-destin : le dilemme brésilien
VII. La lyrique de l’exil : l’autre en tant que forme
VIII. « Le Brésil était la terre de l’exil » : Euclides da Cunha et le paradis perdu
IX. L’exil comme axe : accomplis et exilés ou appel à une édition critique de Racines du Brésil
X. L’homme cordial et ses précurseurs : les avant-gardes européennes
Troisième partie :
Littérature brésilienne : perspectives
XI. La littérature brésilienne aujourd’hui : un panorama
XII. La « dialectique de la marginalité » et la guerre des récits dans la culture brésilienne contemporaine
XIII. « C’est plus simple de répondre à vos questions » : la fiction de Bernardo Carvalho
XIV. Carola Saavedra : la fiction parangolé-bichos
XV. « Tant d’indulgence envers moi-même m’incommode » – Ricardo Lísias ou la fiction qui ne renonce pas