Jeter intro anthropo


      Le sacré, c'est tout ce qui maîtrise l'homme d'autant plus sûrement que l'homme se croit plus capable de le maîtriser.          
René Girard, La Violence et le Sacré

Introduction

La Violence et le sacré est, sans conteste, un grand ouvrage d’anthropologie, au sens classique du terme. Cet ouvrage relance et renouvelle profondément la question du sacrifice, abandonnée pendant un demi-siècle par la recherche académique, en la reprenant d’un point de vue morphogénétique. Il tente de reconstituer la dynamique interne de la vie sociale et le processus même d’hominisation, de comprendre les conditions d’émergence de communautés stables, en mettant au jour les mécanismes qui leur permettent de réguler leurs facteurs internes de dissension. Il aboutit ainsi à une théorie générale de la culture qui réhabilite et renforce l’hypothèse de l’origine rituelle de la guerre, de la chasse et de la domestication. Le sacrifice, en effet, exige à la fois de capturer des victimes humaines ou animales à l’extérieur du groupe et de les assimiler au point de devenir des substituts rituels de membres de la communauté. Le captif, dont la vie est épargnée, peut ensuite devenir un serviteur rituel puis un esclave à des fins économiques, et l’animal, passer du statut de victime propitiatoire à celui bête de somme ou de  source de nourriture. Girard donne une explication lumineuse de cette généalogie, passée de mode chez les ethnologues, mais redécouverte depuis peu par les archéologues.
Même lorsqu’il utilise les matériaux littéraires, c’est toujours à des fins anthropologiques. Romans ou tragédies sont pour lui des documents ethnographiques. Son premier livre est une théorie du roman, mais surtout une théorie du désir triangulaire, dont les deux grandes formes, celle de la médiation externe et celle de la médiation interne, sont rapportées à deux types de société opposés. Les sociétés aristocratiques, c’est-à-dire holiste et hiérarchique, et les sociétés démocratiques, individualistes et égalitaires. Ces deux types sont illustrés par deux petits mondes proustiens, l’univers familial de Combray et le salon Verdurin, que Girard compare expressément à des cultures fermées et qu’il décrit avec la minutie d’un ethnographe. Il y repère déjà la centralité du religieux et l’importance du mécanisme de la victime émissaire.

Bref, le travail de Girard est d’entrée de jeu de nature scientifique. Son point de vue n’est pas celui d’un théoricien de la littérature, ni d’un philosophe, ou encore d’un théologien. Ses modèles ne sont ni Sainte Beuve ou Lanson, ni Kant ou Hegel, ni Saint Augustin ou Saint Thomas. Travaillant à la charnière de la nature et de la culture, il se réclame expressément et à bon droit, d’une côté, de Darwin et de Konrad Lorenz, de l’autre, de Durkheim et de Hocart.




Lire les articles et ouvrages introductifs  de Lucien Scubla (enthnologue, ancien membre du CREA, membre duConseil Scientifique de l'ARM) et Camille Tarot (Professeur honoriaire de sociologie à l'université de Caen)


Le conflit des anthropologies de Claude Lévi-Strauss et de René Girard, texte de sa conférence donnée au colloque "Girard Lévi-Strauss: le sacrifice aujourd'hui" à l'ENS le 27 janvier 2012.

Le symbolique et le sacré
La question de la religion - de son essence, de sa fonction, de son origine - a été centrale dans la sociologie et l’anthropologie classiques. Pour la tirer des impasses et de la stagnation où elle est reléguée de nos jours, Camille Tarot propose ici un bilan critique des œuvres des meilleurs comparatistes, à travers leurs théories si contradictoires de la religion. Huit auteurs principaux sont soumis à examen : Emile Durkheim, Marcel Mauss, Mircéa Eliade, Georges Dumézil, Claude Lévi-Strauss, René Girard, Pierre Bourdieu et Marcel Gauchet. L’important en la matière est d’abord d’esquiver les faux irénismes comme les querelles stériles ou haineuses, pour confronter les doctrines en profondeur et systématiquement. Ensuite, de déceler l’impensé et les refoulements que produit chaque cadre théorique, pour proposer le modèle ou l’idéal-type de la religion qui paraît le mieux fondé. Au fil de cet examen, il apparaît que l’essence du fait religieux est à rechercher à l’intersection du symbolique et du sacré, à comprendre à partir des fondations d’Emile Durkheim et de Marcel Mauss, complétées par les apports de René Girard. La possible fécondité du modèle qui se dégage ainsi s’atteste par sa capacité à relire les sources et à renouveler en profondeur les vieux problèmes des fonctions de la religion, qui n’avaient guère avancé depuis Emile Durkheim.  (Editions La Découverte)



Le site néolithique de CatalHöyük


En 2008, au Collège des Bernardins,  René Girard a donné une conférence sur CatalHöyük en Anatolie centrale, un des plus grands sites du Néolithique du Proche-Orient.

Ecouter laconférence

Lien vers les conférences données en 2009 par René Girard à Stanford sur Catal Höyük.

Çatalhöyük










Depuis 2013, les chercheurs du département Recherche de la Fondation Imitatio travaillent avec Ian Hodder, archéologue et directeur des recherches du site archéologique de CatalHöyük .


Voir : Un chantier archéologique. Premiers pas à Catal Höyük






Entretien de René Girard sur Charles Darwin


BIBLIOGRAPHIE


Parmi les nombreux travaux d’anthropologie qui s’inspire des idées girardiennes, lire :


Anspach Mark R.,

A charge de revanche. Figures élémentaires de la réciprocité, Seuil, Paris, 2002

Girard, Cahier de l’Herne n° 89


Jean-Pierre Dupuy.

Dans l’œil du cyclone, colloque de Cerisy, Carnets Nord, Paris 2009

Œdipe mimétique, Paris, L’Herne, 2010


Baquier, Alain,

L’Ile de la Possesion. Archipel Crozat- Terres australes et antartiques françaises. Ethnologie d’une île déserte, Editions Petra, 2015.


Codwell, Scott,

Fleming, 2012, Chris et Hodge, Joel, Violence, Desire, and the Sacred, New York, Continuum International Publishing Group

Dupuy, Jean-Pierre et Varela, Francisco (éd.),

Undestanding Origins, Boston Sudies in the Philosophy of Science, Kluwer Academic Publishers, 1992.


Jacoby, Russell, Bloodlust: On the Roots of Violence from Cain and Abel to the Present, Free Press, 2011.


Patou-Mathis, Marylène, La préhistoire de la violence et de la guerre, Paris, Odile Jacob, 2013.


Scubla, Lucien,

« Les sciences cognitives, fil d’Ariane ou lit de Procuste pour l’anthropologie », Les cahiers du CREA n° 12, 1987.

« Vers une anthropologie morphogénétique. Violence fondatrice et théorie des singularités », Le Débat, 1993/5 n° 77, 90-1071993.

« À propos de la formule canonique, du mythe et du rite », L’Homme, tome 35 n° 135,1995.

Lire Lévi-Strauss, Paris, Odile Jacob, 1998.

« L'anthropologie a-t-elle fait des progrès depuis A. Hocart ? », La Revue du MAUSS semestrielle, n° 18 : 338-360 et n°19, p. 201-220, 2001-2002.

« Roi sacré, victime sacrificielle et victime émissaire », La Revue du MAUSS semestrielle, n° 22, p. 197-2212003.

« Les hommes peuvent-ils se passer de toute religion ? Coup d’œil sur les tribulations du religieux en Occident depuis trois siècles », Revue du Mauss, 2003/2 n° 22, p. 90-117, 2003.

« Le sacrifice a-t-il une fonction sociale ? », Pardès, 2005/2 n° 39, p. 143-159, 2005.

« L’apport de René Girard à l’anthropologie du sacrifice : le sacrifice protège les hommes de la violence », Raison présente, 170, p. 103-116,2009.

2014, Donner la vie, donner la mort. Psychanalyse, anthropologie, philosophie, Lormont, Le bord de l’eau


Simonse, Simon,

1992, Kings of Disaster : Dualism, Centralism and the Scapegoat King in Southeastern Sudan, Leiden, Brill

Tarot, Camille,

2008, Le Symbolique et le sacré.Théories de la religion, La Découverte, Paris,


Verdier, Raymond, Poly, Jean-Pierre et Courtois, Bernard,

1981, La vengeance, tome 1 : " Vengeance et pouvoir dans quelques sociétés extra-occidentales ", Paris, Cujas

Viard, Bruno,

2002, Les trois neveux ou l’altruisme et l’égoïsme réconciliés, Paris, PUF

2015, Amour-propre. Des choses connues depuis le commencement du monde, Lormont, Le Bord de l’eau


Ouvrages collectifs :

Mimétisme, violence, sacré. Approche anthropologique de la littérature narrative médiévale,

Études réunies par Hubert Heckmann et Nicolas Lenoir

Contributions de Dominique Boutet, René Girard, Philippe Haugeard,

Hubert Heckmann, Beate Langenbruch, Nicolas Lenoir, Bertrand Rouziès Léonardi, KarinUeltschi, Jean-Jacques Vincensini.



Ouvrages d’anthropologie se référant ponctuellement à René Girard :

DETIENNE Marcel

VERNANT Jean-Pierre

DE HEUSCH Luc

ADLER Alfred

COPET (de) Daniel

MULLER Jean-Claude


 
Dernière modification : 31/03/2020